

C'est arrivé le... 15 août 1960
Josaphat Brunet devient directeur général de la Sûreté provinciale
En savoir plusDécouvrir les sujets
Le contrôle de la vitesse sur les routes du Québec n’est pas l’apanage du 20e et du 21e siècle. Dès la première moitié du 19e siècle, avant même la création de la Police provinciale en 1870, des lois sont votées pour réduire l’allure des cavaliers et des attelages à certains endroits névralgiques, comme les grandes villes et leurs alentours ou les routes entourant les lieux de culte. Sans aucun moyen précis d’évaluer la vitesse des passants, les officiers de la paix doivent s’en remettre à leur observation et leur jugement, ce qui rend leur évaluation subjective et inégale. Une infraction pour le dépassement de la vitesse maximale prescrite par la loi, le trot ordinaire, est à l’époque punissable par une amende, ou lorsque le paiement est impossible, par un emprisonnement du contrevenant.
À partir du début du 20e siècle, l’augmentation de la circulation automobile est fulgurante au Québec. Pour améliorer la sécurité routière, le gouvernement provincial légifère et impose des règlements et des limites de vitesse. Une « police de la route » est également créée en 1914. Sous la dépendance du département de la Voirie du Québec, elle a pour tâche de patrouiller le réseau routier de la province et de mettre en application les règlements et les limites de vitesse en vigueur sur les routes. L’évaluation subjective de la vitesse des usagers est cependant toujours en application. Sans outils spécialisés pour détecter la vitesse d’un objet en mouvement, les policiers doivent s’appuyer sur des méthodes réfutables et peu précises. La grosseur du nuage de poussière soulevé par une automobile sur un chemin de terre, le chronométrage du déplacement d’un automobiliste entre deux points fixes ou la vérification du temps parcouru entre deux barrières de contrôle routier comme aux entrées du parc des Laurentides ne sont que quelques exemples des moyens qui pouvaient être utilisés à l’époque.
En 1938, la Police de la route est intégrée à la Sûreté provinciale, mais les techniques de détection de la vitesse ne changent pas. Il faudra attendre les années 1960 pour voir apparaître un appareil scientifique et fiable au sein de l’organisation, et qui viendra révolutionner le domaine : le radar (radio detection and ranging).
Inventé à l’aube de la Deuxième Guerre mondiale, le radar est un appareil qui émet de façon régulière des ondes radioélectriques et qui collecte celles réfléchies par les objets rencontrés sur leur chemin. Fort utile pour repérer les avions et les navires ennemis durant le conflit, cette technologie militaire s’implante par la suite dans différents secteurs d’activité civils.
Arrive alors John Baker, un ingénieur qui a travaillé sur le radar durant le conflit. Il fait breveter un appareil de contrôle du trafic. Ce cinémomètre, jumelant la technologie du radar et l’effet Doppler, permet maintenant de déterminer la vitesse d’un objet en mouvement. Cette nouvelle technologie prometteuse s’implante tranquillement dans les différents corps de police nord-américains et aboutit finalement à la Sûreté provinciale en 1962. Pour la première fois, les patrouilleurs de l’organisation ont accès à un outil précis et fiable pour contrôler la vitesse des usagers de la route, améliorant ainsi la sécurité routière dans la province.
Les premières opérations radar de la Sûreté provinciale ont lieu à l’été 1962. Les patrouilleurs sont alors équipés d’un radar analogique et d’un appareil à charte graphique enregistrant les résultats captés par le radar. Le système, plutôt lourd, s’avère compliqué à installer et à manipuler. En plus du système de radar et de l’appareil à charte graphique, l’opérateur doit transporter une bouteille d’encre et un support en bois pour installer l’appareil ainsi qu’un niveau pour tout mettre en place. Par la suite, l’opérateur doit tester le radar à l’aide de diapasons de différentes longueurs d’onde. En 1963, devant la complexité de tout ce processus, l’École de police du Québec décide d’instaurer une formation d’opérateur de radar pour les policiers de la Sûreté provinciale. L’arrivée de cette nouvelle technologie au sein de la Sûreté provinciale procure une efficacité et une précision accrues lors d’opérations de surveillance de la vitesse. Elle offre également une preuve scientifique de l’infraction. Le radar fait partie des différentes innovations du milieu du 20e siècle qui ont mené à la professionnalisation du métier de policier.
Après quelques années d’utilisation, l’organisation décide de retirer les appareils à charte graphique pour simplifier le travail des policiers. En effet, l’utilisation de cet appareil lors d’une opération radar requiert beaucoup de temps de travail administratif de la part du policier, ce qui réduit, par le fait même, le temps qu’il consacre à la surveillance de la circulation.
Devant l’évolution technologique des cinémomètres, la Sûreté du Québec décide d’utiliser une approche prudente pour éviter les retours en arrière. La première grande innovation des cinémomètres radar adoptée par l’organisation est l’affichage numérique. Apparu au cours des années 1970, l’affichage numérique simplifie la lecture de la vitesse par l’opérateur du radar, ce qui facilite le travail du policier et apporte une plus grande précision que la version analogique. C’est également durant les années 1970 que l’organisation se dote d’un premier cinémomètre radar portatif, soit de type pistolet : le Muni Quip T-3 de la compagnie Tribar Industries Inc.
Au tournant des années 1980, la Sûreté du Québec met à l’essai différents modèles d’un nouveau type de radar : le radar dynamique. Cette nouvelle technologie permet de capter la vitesse des véhicules non seulement lorsque l’autopatrouille est en position stationnaire, mais également lorsqu’elle est en mouvement. Une révolution pour l’époque puisqu’auparavant, le patrouilleur devait immobiliser son véhicule en bordure de la route pour effectuer une opération radar.
Au début des années 1990, une nouvelle technologie fait son apparition sur le marché et au sein de l’organisation : le cinémomètre laser. En utilisant un lidar (light detection and ranging) qui projette des ondes lumineuses, ces appareils peuvent cibler directement une voiture, ce qui permet une identification précise et exacte du véhicule en infraction. De plus, puisque la technique utilisée n’est pas la même que pour le radar, le cinémomètre laser aide à déjouer les détecteurs de radar conventionnels, ce qui constitue un très grand avantage pour le patrouilleur à l’époque et encore aujourd’hui.
Les deux types de technologies coexistent toujours dans l’arsenal de la Sûreté du Québec. Leur utilisation est dictée par leurs forces et leurs faiblesses respectives. Certains modèles de cinémomètre sont plus utilisés en milieu rural, alors que d’autres le sont en milieu urbain ou encore, dans le cadre d’activités récréotouristiques.
En 2009, un nouvel outil de surveillance de la vitesse fait son apparition sur les routes du Québec : le cinémomètre photographique. Fruit de la collaboration de plusieurs organismes gouvernementaux et policiers du Québec, ce projet pilote devient permanent à partir de 2012. Le but de ces appareils est d’améliorer la sécurité sur les routes en ciblant des endroits reconnus accidentogènes et où il est difficile, voire dangereux pour les policiers d’effectuer de la surveillance.
L’implication de la Sûreté du Québec dans le projet est multiple. Celle-ci « […] gère le Centre de traitement de la preuve où s’effectuent notamment la gestion des appareils fixes et la vérification de leur bon fonctionnement, ainsi que la confection des rapports d’infraction généraux (RIG); ces rapports sont produits à partir des dossiers générés par tous les ACA [appareils de contrôle automatisés] installés. De plus, elle gère et coordonne les opérations policières liées à l’utilisation des ACA mobiles vitesse sur le réseau routier pour lequel elle assure la surveillance. Également, elle soutient et conseille les corps policiers municipaux dans leurs activités associées au projet pilote de coopération municipale. La SQ [Sûreté du Québec] assure aussi la formation de tout le personnel appelé à utiliser les différents équipements liés au contrôle automatisé. » (Direction générale de la sécurité et du camionnage, 2018, p. 93)
Pour la Sûreté du Québec, l’utilisation du cinémomètre n’a pas seulement une vocation répressive, mais elle peut également être un outil de sensibilisation. Un des exemples les plus récents est le recours, pour la première fois au printemps 2022, d’un radar vivant lors d’une opération de sensibilisation à l’importance de respecter la limite de vitesse dans les zones scolaires. Cet outil choc développé par la Société de l’assurance automobile du Québec et le Service de police de la Ville de Laval s’inscrit dans la philosophie de prévention, de sensibilisation et d’éducation prônée par la Sûreté du Québec.
Le concept est simple. Sous la supervision d’un policier, un enfant porte un sac à dos contenant un cinémomètre radar et arborant un panneau qui affiche la vitesse des automobilistes. À la vue de l’enfant, les conducteurs ont tendance à prendre conscience de leur vitesse et à ralentir instantanément.
Depuis longtemps, la surveillance de la vitesse sur les routes se veut un moyen d’améliorer la sécurité routière. Plusieurs techniques ont été utilisées au fil du temps, mais l’arrivée du cinémomètre bouleverse les façons de faire à la Sûreté du Québec. Que ce soit par la répression ou la prévention, le cinémomètre permet aux conducteurs de prendre conscience de leur vitesse et de diminuer les risques d’accidents sur la route.
François Beaudoin, conseiller en patrimoine, 2023
L’identification visuelle des policiers a toujours été un élément important de l’uniforme de ceux-ci. Pour ce faire, tout au long de son histoire, la Sûreté du Québec a utilisé plusieurs types d’ornements sur son uniforme. Au fil des différentes époques, ces ornements sont devenus des marqueurs historiques de l’évolution de l’organisation et de son image ainsi qu’un symbole du professionnalisme des policiers les portant. Afin de bien s’orienter, il est plus pratique de séparer en deux grandes familles ces éléments bien distinctifs : les identifications d’épaule et les insignes, couramment nommés badges, de l’anglais.
Identifications d’épaule
Les identifications métalliques d’épaule portent habituellement l’acronyme de l’organisation qu’elles représentent. C’est ainsi que les lettres PPQ renvoient à la « Police provinciale de Québec » et que les lettres CLQ renvoient à la « Commission des liqueurs du Québec ». Plusieurs variantes de ces identifications métalliques seront produites et utilisées par l’organisation. L’usage généralisé de ce type d’insigne se termine vers 1960 avec les grandes réformes de la Révolution tranquille.
À partir de ce moment, les écussons en demi-lune apparaissent sur les uniformes de l’organisation. Initialement fabriqués en caoutchouc, une matière se dégradant facilement, ils sont rapidement remplacés en 1962 par des modèles en tissu, beaucoup plus résistants. Pour ce grand changement, l’écusson en demi-lune arbore les nouvelles couleurs de l’organisation, soit le vert et le jaune. La forme de demi-lune est en utilisation jusqu’en 1994 où la forme du blason (bouclier) est adoptée. Ce nouvel écusson est beige et inclut l’emblème de 1983, jumelé à la devise de l’organisation : Service, Intégrité, Justice. Il est utilisé jusqu’en 2016, lors de l’arrivée du nouvel uniforme introduisant une nouvelle couleur organisationnelle pour la première fois depuis 50 ans : le noir. De 1962 à 2020, une succession de sept différents écussons d’épaule apparaissent sur l’uniforme de l’organisation.
Insignes
Encore une fois, une multitude de variantes existent selon l’époque ou la fonction du détenteur de l’insigne. De façon générale, ils sont de petite dimension et ils sont fabriqués en métal. On peut souvent y remarquer le matricule ou le grade du policier ainsi que les armoiries du Québec et le nom ou l’emblème de l’organisation. En fonction de l’époque, plusieurs types d’insignes sont utilisés sur les uniformes, tels que les insignes de képi, les insignes de poitrine ou encore les insignes de collet.
Dans tous les cas, les identifications d’épaule et surtout les insignes représentent l’autorité dont le policier est investi et permettent une grande visibilité de celui-ci au sein du public. La visibilité des forces policières est souvent le premier pas vers la sécurité du public et la prévention de la criminalité.
Frédéric Martel, technicien en muséologie, 2020
Selon la Société française de vexillologie, « un drapeau représente bien davantage qu’une simple pièce d’étoffe. Il traduit de manière symbolique le message qu’une collectivité […] ou qu’une personne […] entend délivrer au monde environnant et dans lequel elle proclame ses valeurs fondamentales, ses croyances, sa culture, affirme son autorité et son rang, souligne son particularisme, en bref, révèle son identité profonde ».
Le domaine illustrant parfaitement l’importance que peuvent avoir les drapeaux est l’univers militaire. Grande utilisatrice de bannières et d’étendards depuis longtemps, l’armée y a recours pour l’identification visuelle des organisations militaires, mais également pour susciter la fierté et la cohésion nécessaires à l’efficacité opérationnelle. La Sûreté du Québec, par son état d’organisation paramilitaire, poursuit cette tradition ancestrale.
À ses débuts, la Police provinciale est composée d’un seul type de policier, le gendarme. Un emblème unique et un uniforme caractéristique semblent avoir suffi à identifier le corps de police et suscité fierté et cohésion en son sein. Dans la première moitié du 20e siècle, l’organisation a évolué en intégrant le Bureau des détectives provinciaux (1922) et la Police de la route (1938). Malgré les fusions, la nouvelle Sûreté provinciale (depuis 1938) reste séparée en plusieurs branches et les uniformes gardent une couleur et une forme spécifiques à chacune d’entre elles.
C’est pour réunir une Sûreté provinciale plutôt hétéroclite sous une identité rassembleuse et un symbolisme fort que les dirigeants créent un drapeau à la fin des années 1950. On y appose ainsi l’emblème de l’organisation en son centre et on représente en canton l’archange saint Michel, patron universel des policiers, terrassant le dragon.
En 1962, dans la foulée des réformes des années 1960, on instaure un uniforme et une couleur unique, le vert, à tous les policiers de la Sûreté provinciale. Le but avoué de ce changement est d’unifier le corps de police et d’insuffler de la fierté à ses policiers. Cette nouvelle couleur, tout comme l’emblème, deviendra rapidement reconnue et identitaire pour l’organisation.
Le drapeau s’adapte promptement à cette nouvelle réalité. Dans les années 1970, le drapeau de la Sûreté du Québec se compose d’une bande verte au guindant et au flottant, ainsi que d’une bande blanche en son centre arborant l’emblème de l’organisation entouré de feuilles de laurier. Cette bande blanche est remplacée en 1980 par une bande jaune et par les emblèmes organisationnels subséquents ; par exemple, celui de 1983 affichant la devise de la Sûreté du Québec.
L’apparition d’un drapeau organisationnel et l’adaptation de celui-ci aux valeurs fondamentales et aux particularités de la Sûreté du Québec évoluant au fil du temps démontre l’importance qu’il revêt pour les employés travaillant sous son égide. Par le fait même, il joue son rôle en suscitant la fierté et la cohésion nécessaires à l’efficacité opérationnelle de l’organisation.
Patrimoine de la Sûreté du Québec, 2021
L’idée de déceler un mensonge en détectant la variante de la pression sanguine apparaît dès le 18e siècle dans l’ouvrage romancé de Daniel Defoe (1661?-1731), An effectual scheme for the immediate preventing of street robberies, and suppressing all other disorders of the night, publié en 1731. Dans la deuxième moitié du 19e siècle, le physiologiste italien Angelo Mosso (1846-1910) expérimente et améliore le pléthysmographe, un appareil scientifique servant à mesurer et enregistrer les changements dans le flux sanguin tout en associant ces variables aux émotions et aux stimuli, comme la peur et les sursauts. Il est donc aisé de comprendre l’origine de l’appellation du « détecteur de mensonges »!
Il faut attendre les travaux de Leonarde Keeler (1903-1949), considéré comme le père du polygraphe par plusieurs, pour réellement atteindre un horizon de rigueur scientifique. En 1939, il fait breveter le prototype du Keeler Polygraph.
La première unité à utiliser les polygraphes à la Sûreté provinciale est l’Escouade des homicides, de la Division de Montréal. Durant les années 1950, les enquêteurs utilisent le Keeler Polygraph, modèle 302, de la compagnie Associated Research, basée à Chicago, dans l’Illinois. Par la suite vient le B & W Lie Detector Electronic Psychometer, modèle 7AC, de la compagnie B & W Associates, basée à Michigan City, dans l’Indiana. Ce dernier modèle, plus performant, est utilisé durant les années 1960.
Dans le but avoué de combattre la criminalité avec des moyens plus sophistiqués, la Section de polygraphie, qui est rattachée au Bureau du conseiller en enquêtes criminelles, est officiellement inaugurée en juillet 1976. Le tout premier polygraphiste officiel de la Sûreté du Québec est l’agent John Galianos. Comme il n’existe pas encore d’école de formation au Canada, les connaissances sont acquises à l’Institut de polygraphie Keeler de Chicago. Entre 1976 et 1995, les spécialistes utilisent le Factfinder, un produit de haute qualité de la Lafayette Instrument Company, basée en Indiana.
Une épreuve polygraphique se divise habituellement en trois phases distinctes. Au départ, il y a l’entrevue préliminaire avec le sujet, où il est question de ses antécédents physiques et psychologiques, ainsi que de sa condition intellectuelle, du fonctionnement de l’appareil et, finalement, de la signature du formulaire d’acceptation volontaire. Initialement, cette période est prévue pour réduire l’anxiété du sujet et démontrer qu’il est apte à passer le test.
Vient ensuite l’étape du test polygraphique, se déroulant seul à seul entre le sujet et le polygraphiste. Une série de questions est posée au sujet, incluant des questions générales (nom, âge, adresse, métier), ainsi que des questions relatives à l’enquête. Le rôle du spécialiste est d’analyser les résultats et de tirer une des trois conclusions suivantes : il est en présence de réactions d’apparence mensongère, il est en présence de réactions normales avec apparence de vérité ou le test est non concluant. Dans ce dernier cas, il ne peut pas se forger une opinion scientifique vis-à-vis des réactions physiques ou psychologiques du sujet.
Après les analyses des enregistrements polygraphiques, l’entrevue finale se déroule avec le sujet et un retour sur les résultats du test peut être effectué. L’enquêteur prend note des résultats et peut faire des liens pertinents entre son enquête, le sujet et les résultats. Normalement, le test se fait vers la fin d’une enquête, afin de s’assurer que certains éléments de preuve servent à étoffer la série de questions.
De façon générale, un polygraphe est fabriqué à partir de trois composantes principales, soit le pneumographe, le galvanomètre et le sphygmographe. Le pneumographe est composé de deux tubes ondulés apposés sur la poitrine et enregistre les variations respiratoires. Pour sa part, le galvanomètre enregistre la sudation par l’utilisation de deux électrodes appliquées sur les doigts. Finalement, le sphygmographe note le rythme des pulsations cardiaques et le flux et le reflux sanguins, en plus d’enregistrer la tension artérielle. Cet appareil est donc la combinaison de trois instruments scientifiques recueillant et enregistrant des données sur des chartes graphiques.
Un virage numérique s’effectue en 1993, lorsque les enregistrements recueillis sur de nouvelles machines sont portés à l’écran, rendant l’opération plus fiable encore. Le premier modèle électronique utilisé par les spécialistes, entre 1995 et 2005, est le polygraphe de la Stoelting Co., modèle CPS I. Son successeur, le CPS II, est utilisé depuis 2005 à la Sûreté du Québec.
Depuis leurs débuts dans l’organisation, les polygraphes ont été d’une grande utilité. Le domaine de la polygraphie n’a cessé de se perfectionner afin de donner des résultats de plus en plus fiables. L’analyse de ces résultats a permis aux polygraphistes d’offrir de meilleures conclusions aux enquêteurs.
Frédéric Martel, technicien en muséologie, 2020
Au début du 20e siècle, la prohibition s’installe partout en Amérique du Nord. Seul le Québec fait exception à la règle. En effet, la Belle Province se dote, en 1921, d’une loi créant un monopole d’État sur l’alcool, la « Loi concernant les liqueurs alcooliques ». Pour respecter la nouvelle législation, on met sur pied une nouvelle organisation étatique, la Commission des liqueurs. En plus de gérer le monopole de l’alcool, l’ancêtre de la Société des alcools du Québec doit mettre en application et faire respecter la loi en matière d’alcool. Pour s’aider dans cette tâche, elle se dote d’une police gouvernementale possédant des pouvoirs d’enquête, de perquisition, d’arrestation et d’imposition d’amendes dans les domaines de la distribution, de la fabrication et de la vente d’alcool.
À ses débuts, cette police provinciale, dont les policiers sont rapidement surnommés « les liqueurs », se compose de 35 agents, sous-inspecteurs et inspecteurs. D’abord nommée « Service de surveillance » de la Commission des liqueurs, elle devient définitivement la Police des liqueurs en 1934. Les policiers sont embauchés grâce à leurs relations avec le parti politique au pouvoir et ils ne reçoivent que peu de formation. À l’époque, le travail s’apprend « sur le tas ». À la création de ce corps policier, ce sont généralement des vétérans de la Première Guerre mondiale, des détectives privés ou même des anciens agents de la Police provinciale qui composent ses rangs.
Dans les années 1920-1930 au Québec, la demande d’alcool illégal vient surtout des réseaux du crime organisé étatsunien. Les Américains sont subitement assoiffés de whisky canadien, de vin St-Georges ou d’alcool frelaté québécois. Pour répondre à la demande, des contrebandiers, aussi connus sous le nom de bootleggers, commencent à apparaître très rapidement sur tout le territoire québécois. La plupart des grandes villes sont affectées, mais les régions frontalières sont touchées plus sérieusement en raison de leur proximité avec les États-Unis.
Devant l’ampleur du phénomène, la Police des liqueurs s’adapte pour répondre à cette criminalité en croissance. Le corps se développe rapidement : d’à peine 35 hommes en 1921, elle triple ses effectifs en l’espace de cinq ans d’existence. L’ampleur des réseaux force aussi ses policiers à développer les premières méthodes d’enquête modernes, notamment la collecte et l’échange de renseignements, l’utilisation d’agents doubles ou de délateurs et la filature en véhicule. L’automobile devient l’outil privilégié des bootleggers puisqu’elle fait son apparition au Québec à l’époque. Malgré sa modestie, la Police des liqueurs mène des opérations partout dans la province.
La contrebande d’alcool du temps s’accroît de plus en plus dans les années 1920 et elle devient même incontrôlable. Ce trafic entraîne d’autres crimes plus graves comme des vols, des agressions armées, des meurtres, des enlèvements et de la prostitution dans toute la province. Ainsi, le mandat limité d’application de la « Loi sur les boissons alcooliques » mène la Police des liqueurs à mettre en place des projets de collaboration avec les policiers québécois, canadiens et étatsuniens. Ce sont donc les premières opérations conjointes de l’histoire policière québécoise.
Avec la fin de la prohibition américaine en 1933, la Police des liqueurs redirige ses opérations principalement vers les grandes villes du Québec. Le crime organisé s’y est résolument implanté. Les villes de Québec, Montréal et Hull sont fortement touchées. De grandes opérations policières sont déclenchées dont des arrestations massives de centaines d’individus à la fois, des saisies d’alcool, la destruction publique d'appareils de jeu ainsi que des perquisitions de bars. C’est l’époque du « Red Light » de Montréal et du « Petit Chicago » de Hull.
Dans le Québec des années 1940 et 1950, le rôle de la Police des liqueurs demeure fortement critiqué. Le comportement de certains de ses membres à l’occasion d’élections favorables à l’Union nationale de Duplessis, des procès retentissants, des allégations de corruption et le favoritisme lors de perquisitions font couler beaucoup d’encre et ternissent fortement l’image de ce corps policier provincial. Également, au tournant des années 1950, la législation entourant la vente et la consommation d’alcool au Québec est vue comme trop restrictive, voire dépassée.
La mort de Duplessis en 1959 et l’arrivée au pouvoir des libéraux de Jean Lesage en 1960 jettent les bases de la Révolution tranquille. Un des projets du nouveau premier ministre est d’ailleurs de transformer la Police des liqueurs et la Sûreté provinciale de l’époque en les réformant de fond en comble. Au début des années 1960, la Police des liqueurs appartient donc à une époque révolue. La Commission des liqueurs et sa police sont abolies, laissant la place à la fameuse Régie des alcools. Par ailleurs, les lois deviennent moins strictes, et la lutte à la contrebande d’alcool et aux débits clandestins perd de son importance. À cette époque, le crime organisé au Québec et ailleurs commence à délaisser graduellement ce secteur au profit de celui des drogues et stupéfiants.
Avec les réformes policières de la Révolution tranquille, la plupart des membres de la Police des liqueurs sont intégrés à la Sûreté provinciale et deviennent « l’escouade des alcools » en 1961-1962. Près de 60 ans après son intégration à la Sûreté du Québec, force est de constater que la Police des liqueurs a marqué l’histoire de la Sûreté du Québec. Le perfectionnement des techniques d’enquête et la création des unités conjointes et des « équipes volantes » se traduisent par le succès de la lutte aux premières formes de crime organisé, soulignant par le fait même l’importance de la collaboration policière au Québec.
Patrimoine de la Sûreté du Québec, 2020
La création de la Confédération canadienne en 1867 bouleverse le partage des pouvoirs existant au Canada-Uni. Le premier texte constitutionnel du Dominion du Canada, « l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, 1867 », précise notamment que les provinces sont responsables de l’application des lois et du maintien de l’ordre sur leur territoire. Fort de ce nouveau pouvoir provincial, le premier ministre conservateur du Québec, Pierre-Joseph-Olivier Chauveau, présente, en novembre 1869, un projet de loi afin de créer un corps de police provincial. Inspirée par la proposition de loi de 1856 faite par John A. Macdonald, cette initiative de Chauveau a pour but de doter le gouvernement provincial d’une police pour appliquer les lois ainsi que pour contrôler les émeutes et les soulèvements sur l’ensemble de son territoire, la province du Québec.
« L’Acte pour établir un système général de police en cette province » est donc sanctionné par le gouvernement le 1er février 1870. À ses débuts, la Police provinciale est non seulement une police gouvernementale, mais également une police municipale. La nouvelle loi ouvre effectivement la porte à l’établissement de détachements de la Police provinciale dans les municipalités. Une seule cité se voit dans l’obligation d’avoir recours à la nouvelle force de police : la ville de Québec. Au cours de ses premières années d’existence, la Police provinciale fait donc office de police municipale à Québec et déploie quelques détachements dans les municipalités de Sherbrooke, Hull, Lévis et Oka. En plus de ses devoirs municipaux, le corps de police provincial se voit attribuer des mandats gouvernementaux sur l’ensemble du territoire de la province. Malgré le déploiement de quelques détachements dans certaines municipalités, le gros de la force policière est stationné dans la ville de Québec, puisque Montréal n’accepte pas d’en faire sa police municipale.
En 1877, un conflit éclate entre la ville de Québec et le gouvernement provincial. En réponse à la hausse des frais d’entretien de sa police, le gouvernement demande à la ville de Québec d’augmenter sa contribution pour celle-ci. Devant le refus de la ville, le gouvernement abolit le service municipal de la Police provinciale, ce qui oblige Québec à reformer son corps de police municipal. Incapable de régler les problèmes de frais d’entretien de sa police, le gouvernement du Québec se décide à abolir la Police provinciale un an plus tard. De 1878 à 1883, le gouvernement provincial contracte une entente avec la ville de Québec pour l’utilisation de policiers municipaux, au besoin.
En 1884, l’inefficacité de l’entente avec la ville de Québec et la prise de possession des nouveaux édifices parlementaires poussent le gouvernement à remettre sur pied la Police provinciale. Plus modeste et avec des devoirs différents, cette nouvelle mouture s’établit à Québec, tout en conservant sa compétence sur l’ensemble de la province. À ce moment, le but avoué n’est plus d’avoir un système de police uniforme dans la province, mais de mettre sur pied une police gouvernementale qui peut répondre aux besoins spécifiques du gouvernement. Sous la ferrure du nouveau commissaire, Alexandre Chauveau, la nouvelle force de police provinciale se positionne comme un élément essentiel dans le paysage policier de la fin du 19e siècle.
Depuis le début du 20e siècle, le Bureau des détectives provinciaux de Montréal, entité indépendante de la Police provinciale, se charge des problèmes aigus de criminalité, principalement dans la région de Montréal. Mais, en 1920, l’affaire Blanche Garneau vient bouleverser l’ordre policier établi depuis une vingtaine d’années au Québec. Menée par les détectives provinciaux, l’enquête s’enlise et s’attire l’ire du public et de l’opposition politique. En réponse au courroux populaire, le gouvernement apporte, en 1922, des changements dans le domaine policier en intégrant le Bureau des détectives provinciaux de Montréal à la Police provinciale et en mettant sur pied une commission royale d’enquête sur l’administration de la justice.
Plusieurs changements s’opèrent alors au sein de la Police provinciale. L’intégration du Bureau des détectives provinciaux crée une nouvelle branche dans l’organigramme de la Police provinciale. Maintenant, en plus de la gendarmerie, l’organisation comprend la Police judiciaire, des policiers spécialisés en enquête. On établit également une nouvelle division à Montréal pour augmenter la présence du corps de police provincial dans l’ouest du Québec. Chacune des divisions a son État-major et relève directement du procureur général. C’est donc dire qu’à cette époque, la Police provinciale possède une direction conjointe entre les chefs des divisions de Montréal et de Québec. Cette direction conjointe est en vigueur jusqu’en 1932, à la mort du chef de la Division de Québec, Augustin McCarthy. À partir de ce moment, une seule personne assume officiellement la direction de l’organisation, mais officieusement, la Division de Québec conserve une importante autonomie jusqu’en 1961.
Durant les mêmes années, le paysage des corps de police provinciaux commence à se complexifier. À cette époque, on crée plusieurs corps de police indépendants pour surveiller l’application de différentes lois spécifiques. Dès 1914, des constables à motocyclette sillonnent les routes du Québec pour surveiller la circulation et appréhender les conducteurs en infraction. À partir de 1921, la Commission des liqueurs crée son Service de surveillance, qui deviendra plus tard la Police des liqueurs, pour faire appliquer la loi concernant la distribution, la fabrication et la vente d’alcool au Québec. Pour pallier la multiplication de polices gouvernementales, le gouvernement sanctionne en 1938 la « Loi relative à la Sûreté provinciale ». Cette nouvelle loi intègre la Police de la circulation et le Service de surveillance de la Commission des liqueurs à la Sûreté provinciale, qui deviennent les troisième et quatrième branches du corps de police provincial. Le Service de surveillance de la Commission des liqueurs est cependant défusionné en 1940 et restera indépendant jusqu’en 1961.
Parallèlement aux changements structurels vécus par la Police provinciale, une région nordique entame un boum minier qui aura une incidence fondamentale sur l’organisation. La découverte d’importants gisements d’or et de cuivre par Edmund Horne sur les rives du lac Osisko en 1921 provoque la ruée vers l’or en Abitibi. Caractérisé par l’apparition subite de villages et l’arrivée massive d’aventuriers ainsi que de prospecteurs dans la région, ce « Klondike » québécois est à l’origine d’une colonisation minière hétéroclite propice à la prolifération des conflits ouvriers, de la criminalité, de l’alcool illégal et de la prostitution. L’augmentation incontrôlable de cette « débauche » pousse la Police provinciale à mettre en place un détachement temporaire dès 1925. En 1932, ce dernier devient le premier détachement permanent à l’extérieur de Montréal et de Québec. Nommé « Patrouille de l’Abitibi », ce poste situé à Noranda est alors dirigé par le sergent d’état-major Kenneth Turnbull.
Forte de son succès en Abitibi, l’organisation entreprend, à partir de 1937, la création de plusieurs postes dans les différentes régions de la province. En 1940, un poste de pesée de la Police de la route est également ouvert aux abords de chacun des huit ponts qui ceinturent l’île de Montréal. Cette vague de création de postes permet à l’organisation d’occuper tous les comtés de la province pour la première fois de son histoire.
Au début des années 1960, l’arrivée au pouvoir des libéraux de Jean Lesage apporte un vent de changement sur le Québec. La société est en pleine ébullition, et la Sûreté provinciale ne fait pas exception. Le nouveau directeur général, Josaphat Brunet, entreprend une réorganisation majeure de la Sûreté provinciale, allant même jusqu’à changer les uniformes utilisés depuis des décennies en introduisant un uniforme unique de couleur verte pour l’ensemble des policiers.
La structure de l’organisation est également modifiée. Les quatre grandes branches de l’organisation (gendarmerie, police de la route, police des liqueurs et police judiciaire) sont éliminées pour faire place à un corps de police unique. Le pouvoir est centralisé officiellement et officieusement entre les mains du directeur général. Le territoire desservi par la Sûreté provinciale est divisé en deux divisions (Montréal et Québec), qui sont elles-mêmes découpées en subdivisions, puis en sections et, finalement, en postes. Le but derrière cette réorganisation structurelle est de centraliser l’administration de l’organisation au Grand quartier général à Montréal et de décentraliser les activités policières dans les régions.
En 1968, une étude administrative d’envergure est confiée à la firme Raymond Ducharme et associés. Le mandat : proposer la mise en place d’une expertise administrative moderne à la Sûreté du Québec et façonner une « force policière à caractère professionnel ».
Le rapport principal est publié le 17 juillet 1968. Celui-ci souligne une trop grande autonomie des deux divisions (Montréal et Québec), une confusion en raison des multiples niveaux hiérarchiques, le morcellement des fonctions, le caractère nébuleux des politiques administratives et le fait que les fonctionnaires sont écrasés sous une structure complexe.
Le rapport recommande la création de trois niveaux hiérarchiques. Le niveau d’administration centrale déterminerait les grands objectifs de la Sûreté du Québec et approuverait les politiques élaborées par ses services spécialisés. Le niveau régional, appelé district, jouirait d’une grande autonomie de gestion opérationnelle et administrative, en plus de disposer de ressources suffisantes pour répondre rapidement et adéquatement aux besoins régionaux. Enfin, à l’échelle locale, le poste, qui deviendrait le premier niveau d’intervention où seraient concentrés les services de première ligne, serait chargé d’assurer la protection du territoire et de répondre aux besoins de la population.
Le rapport recommande également la création de plusieurs services spécialisés pour alléger la structure organisationnelle. Au cours des années 1970, la Sûreté du Québec crée notamment le Service du personnel, le Service des méthodes pour la rédaction des directives, le Service de la bibliothèque et le Centre de renseignements policiers du Québec (CRPQ).
Finalement, concernant la professionnalisation du travail policier, le rapport Ducharme propose la création de postes de conseillers spécialisés dans divers domaines, soit la « détection », qui devient les Enquêtes criminelles, la circulation, les alcools et la moralité ainsi que les mesures d’urgence. Les quatre premiers postes de conseillers sont créés en 1970, alors que celui des mesures d’urgence est mis en place en 1972.
Au cours des années 1970, la Sûreté du Québec s’emploie donc à mettre en œuvre les recommandations du rapport Ducharme. En plus des différents services et conseillers mentionnés précédemment, l’organisation crée deux districts pilotes : ceux du Bas-Saint-Laurent et de l’Estrie. Ces deux districts permettent de tester les recommandations du rapport de la firme Raymond Ducharme et associés. Ce n’est que vers 1973 qu’on observe la mise en place des huit districts couvrant l’entièreté de la desserte provinciale. Deux autres districts seront ajoutés au fil du temps : celui de la Côte-Nord en 1977 et celui de la Montérégie en 1998.
À la fin du 20e siècle et au tournant du 21e siècle, la Sûreté du Québec connaît de nouveaux changements. En 1980, les 111 policiers de la Police des autoroutes, qui patrouillaient sur les autoroutes à péage de la région de Montréal, intègrent la Sûreté du Québec. Cet ajout permet à l’organisation d’uniformiser les pratiques de surveillance et d’intervention sur les autoroutes et d’être présente partout sur l’ensemble du réseau autoroutier québécois.
Les années 1980 apportent également leur lot de changements structurels de haut niveau pour l’organisation. Sous l’autorité du procureur général depuis 1899, la Sûreté du Québec passe sous celle du Solliciteur général en 1986, puis du ministre de la Sécurité publique en 1988.
Au début des années 2000, l’adoption de la « Loi concernant l’organisation des services policiers » par le gouvernement du Québec modifie la desserte policière de la Sûreté du Québec. Les nouvelles mesures présentes dans cette loi, qui obligent les corps de police municipaux à offrir des services policiers d’un niveau requis par la population qu’ils desservent, poussent plusieurs municipalités à se tourner vers la Sûreté du Québec pour assurer une présence policière sur leur territoire. Près de 80 corps de police et plus de 1 500 policiers seront d’ailleurs intégrés à la Sûreté du Québec entre 1997 et 2012.
En 2016, une nouvelle réorganisation des districts est entreprise. L’organisation territoriale de la Sûreté du Québec passe de dix districts et quinze régions à quatre districts et huit régions. Cette nouvelle structure permet l’optimisation des processus et l’élimination de la gestion en silos qui étaient devenus l’apanage de l’ancien régime. Ces changements se veulent une façon d’offrir à la population une organisation plus performante, tournée vers l’avenir et mieux adaptée aux nouvelles réalités de la police d’aujourd’hui.
Tout au long de son histoire, la Sûreté du Québec a su réagir et s’adapter aux époques qu’elle a traversées. L’organisation est passée d’un corps de police pratiquement confiné à la ville de Québec à un corps de police provincial ayant une réelle présence dans l’ensemble des régions de la province. Elle a également su se moderniser et se professionnaliser au travers de tous ces changements structurels et organisationnels.
François Beaudoin, conseiller en patrimoine, 2024
Jusqu’au tout début des années 1960, le Quartier général de la Division de Québec, situé au 300, boulevard Saint-Cyrille, était reconnu pour abriter une exposition d’objets plutôt inusités. C’est à la demande du chef divisionnaire, le lieutenant-colonel Léon Lambert, qu’une section du corridor du rez-de-chaussée du bâtiment est aménagée en véritable cabinet de curiosités.
Le quartier-maître de l’époque, le lieutenant Rosaire Drolet, se voit donc confier la tâche monumentale de regrouper et d’exposer une collection rassemblant d’authentiques pièces à conviction. On y retrouve, entre autres, des armes à feu, des couteaux, des gourdins, des haches et même un lot d’objets récupérés lors d’une « descente » dans une fumerie d’opium, de la fausse monnaie et des machines à sous saisies lors du démantèlement de salons de jeux clandestins.
Certains de ces éléments sont reliés à des enquêtes bien connues du public. Il y a les objets ayant servi à infliger des sévices à Aurore Gagnon « l’enfant martyre », décédée en 1920. On y retrouve aussi la réplique de la bombe à retardement de l’affaire Albert Guay en 1949, ainsi qu’une trentaine de cordes de pendaison, dont celle de la dernière femme pendue au Canada, le 9 janvier 1953. Bref, ce lot d’objets représente de nombreuses enquêtes régionales effectuées par la division entre 1870 et 1961.
Malgré la place prépondérante donnée aux pièces à conviction dans l’exposition, le musée exhibait également une quantité non négligeable d’objets utilisés par les policiers de la division tels que des pièces d’uniforme, des insignes, des menottes, des matraques et des armes à feu de service.
Or, en 1961, les grandes réformes policières et la centralisation des pouvoirs à Montréal mènent à la fermeture du Quartier général divisionnaire. Le musée est donc démonté, emballé et transporté au nouveau Grand quartier général, alors situé au 360, rue McGill à Montréal. Malheureusement, les boîtes n’y ont jamais été ouvertes… Puis, en 1968, lors de l’occupation officielle de l’actuel Grand quartier général de Montréal, sur la rue Parthenais, les mêmes boîtes sont déménagées à nouveau, sans toutefois soulever de passion. Elles restent scellées et demeurent dans l’oubli général.
Ces boîtes ont été redécouvertes seulement en 1983. La quasi-totalité des traces reliant les objets à leurs crimes respectifs a disparu. Cependant, certaines informations permettent de contextualiser l’origine de ces objets mystérieux. Au total, ce sont environ 300 pièces historiques qui sont parvenues jusqu’à nous, et certaines sont les plus vieilles de la Collection patrimoniale de la Sûreté du Québec.
Frédéric Martel, technicien en muséologie, 2020
Dans les organisations militaires et paramilitaires, la nomination d’un aumônier d’office est chose courante. Au cours de son histoire, la Sûreté du Québec n’a pas fait exception à la règle.
Pour l’organisation, le rôle de l’aumônier consiste à apporter son soutien et à prodiguer des conseils moraux et spirituels aux policiers dans leur travail quotidien, bien souvent ponctué de situations émotionnellement difficiles. L’aumônier est disponible de jour comme de nuit pour ses ouailles. De plus, il préside des cérémonies officielles, telles que les assermentations de recrues, les cérémonies de reconnaissance ou encore, les cérémonies de commémoration des policiers morts en devoir et les funérailles civiques de policiers morts en devoir. Sa grande disponibilité pour les policiers ainsi que sa présence aux cérémonies officielles font de lui un symbole protocolaire important de l’organisation.
Début d’une aumônerie
C’est au milieu des années 1930 qu’on retrouve les traces d’un premier aumônier au sein des forces policières provinciales. Vers 1931, l’abbé Oscar Valiquette devient aumônier du Club social des policiers de la circulation et, par la suite, du service de la Circulation provinciale. Lui succède dans cet office, en mars 1938, l’abbé Henri A. Gaboury.
Avec la mise en application de la « Loi relative à la Sûreté provinciale » le 8 mai 1938, la création d’une nouvelle Sûreté provinciale du Québec regroupant les trois grands corps de police provinciale (Police provinciale, Police de la route et Police des liqueurs) bouleverse le paysage policier du Québec. Le chapelain du service de la Circulation provinciale (Police de la route) se retrouve intégré à la nouvelle entité. La Sûreté provinciale voulant se doter d’une aumônerie, elle nomme l’abbé Henri A. Gaboury aumônier général le 19 septembre 1938. Il occupera ses fonctions jusqu’en 1940, où il sera remplacé par le père Pierre Trudel.
Le 3 octobre 1943, à la demande du lieutenant-colonel Léon Lambert, directeur adjoint à Québec, Son Éminence le cardinal Jean-Marie-Rodrigue Villeneuve instaure une aumônerie dans le district de Québec. C’est à partir de ce moment qu’on retrouvera un aumônier pour chacun des districts de la Sûreté provinciale, soit Montréal et Québec.
Le premier aumônier du district de Québec, l’abbé Georges Laberge, est nommé le 21 septembre 1943, quelques jours avant la création de la nouvelle aumônerie. Sa nomination précoce est directement liée avec la mise en place d’une retraite spirituelle précédant l’inauguration officielle. Selon le souhait du directeur adjoint Lambert, cette récollection était obligatoire pour tous les employés de confession catholique du district.
L’abbé Laberge reste en poste jusqu’à sa mort en décembre 1951. Le poste vacant est ensuite occupé par l’abbé Lomer Gagné. L’office est par la suite octroyé à l’abbé Raymond Lavoie vers 1957 et à l’abbé Raymond Mercier vers 1958. Après une année à titre d’aumônier suppléant, l’abbé Lucien Ouellet est nommé aumônier de la Sûreté provinciale à Québec le 18 octobre 1964. Il garde cette fonction jusqu’en 1977.
Malgré l’instauration de la nouvelle aumônerie à Québec, le père Trudel continue son office dans le district de Montréal jusqu’en 1951. À son départ, on nomme le père Arthur Dubois aumônier de la Sûreté provinciale pour Montréal. Il sera remplacé en 1968 par le père Florimond Noiseux jusqu’à la retraite de ce dernier en 1977.
Centralisation de l’aumônerie
Avec le départ du père Florimond Noiseux en 1977, la Sûreté du Québec prend la décision de nommer l’abbé Lucien Ouellet aumônier de l’ensemble de l’organisation. Il occupe le poste jusqu’à la fin de son contrat, soit le 2 avril 2018, date de l’abolition du poste d’aumônier. Tout au long de sa carrière dans l’organisation, l’abbé Lucien Ouellet obtient successivement le grade de capitaine, d’inspecteur (1987) et finalement d’inspecteur-chef (1995). Il porte l’uniforme et les insignes du grade qui lui est attribué. Il détient par ailleurs de nombreuses décorations, notamment la Médaille de la police pour services distingués (avec barrettes).
Les 54 années de loyaux services du dernier aumônier de l’organisation représentent plus de la moitié des 80 années d’existence d’une aumônerie à la Sûreté du Québec. Au cours de ses nombreuses années d’office, l’abbé Lucien Ouellet a vu défiler des milliers de policiers sous le directorat de treize dirigeants, en commençant par le directeur général Josaphat Brunet en 1964, jusqu’au directeur général Martin Prud’homme, en 2018.
Retraite spirituelle et saint patron
Dès sa nomination comme aumônier général de la Sûreté provinciale, l’abbé Henri A. Gaboury propose une récollection à l’intention des employés de l’organisation lors de la semaine sainte de 1939. Ce type de retraite fermée devait permettre aux policiers de se ressourcer et de se livrer à une introspection dans un cadre religieux. Elle donna lieu à plusieurs autres séances durant la période pascale les années subséquentes.
L’année 1939 ne voit pas seulement le début des retraites fermées à la Sûreté provinciale, mais également le début d’une longue odyssée pour offrir un saint patron à l’organisation, qui se terminera par une nomination internationale. Tout commence par la nomination de l’archange saint Michel comme saint patron de l’Association des chefs de police et de pompiers de la province par Son Éminence le cardinal Villeneuve le 20 juillet 1939. En procédant à cette nomination, le prélat acquiesce à la demande faite par le lieutenant-colonel Léon Lambert de choisir un protecteur céleste pour ses hommes. Cependant, pour le lieutenant-colonel Lambert et Son Éminence le Cardinal Villeneuve, ce choix se devait d’être ratifié par le souverain pontife. Après l’envoi d’une demande de ratification par le prélat de Québec et plusieurs années de réflexion, Sa Sainteté Pie XII proclame l’archange saint Michel patron universel des policiers du monde entier le 9 mai 1950. C’est donc une initiative québécoise qui est à l’origine de cette nomination internationale.
François Beaudoin, conseiller en patrimoine, 2021
Explorer les thématiques
Cette section regroupe l’histoire de crimes ayant marqué l’imaginaire québécois. Pour que ces événements soient pris en compte, ils doivent avoir été fortement médiatisés, avoir eu un impact sur la société québécoise et avoir fait l’objet d’une enquête de la Sûreté du Québec.
Chaque texte présente l’implication de la Sûreté du Québec au travers d’une contextualisation historique, au cœur de l’enquête et des démarches judiciaires.
Cette section se penche sur les événements majeurs ayant marqué l’histoire de la Sûreté du Québec et l’histoire québécoise.
Dans ces textes, la Sûreté du Québec est en mode réaction face à des événements soudains, tels que des catastrophes naturelles, des crises ou des décès de masse. L’implication de la Sûreté du Québec dans ces moments d’urgence est cruciale pour sauver des vies et aider les citoyens en danger.
Cette section illustre la carrière de différents personnages clés qui ont marqué l’histoire de la Sûreté du Québec. Le cadre d’emploi du personnage n’est pas un facteur déterminant de son importance; ce sont plutôt les réussites, les réformes ainsi que les événements majeurs auxquels celui-ci a participé qui importent.
Cette section plonge dans l’histoire, dans l’évolution et dans le quotidien des différentes unités ayant jalonné l’histoire de la Sûreté du Québec, bien souvent à partir de leurs débuts.
Nous y présentons les changements qu’a vécus chacune de ces unités, ainsi que la création de celles-ci et l’impact qu’elles ont eu sur l’organisation et le travail policier au Québec.
Cette section examine certaines des opérations majeures ayant marqué l’histoire de la Sûreté du Québec et l’histoire québécoise.
Les opérations de sécurité planifiées par la Sûreté du Québec y sont présentées sous différentes facettes. On peut donc y retrouver des événements tels que la visite de dignitaires, la tenue de sommets et la présentation de grandes manifestations sociales ou sportives. Le rôle et l’implication de la Sûreté du Québec dans ces événements de grande envergure sont au centre de ces textes.
Parcourir les événements
Florent Gagné devient directeur général de la Sûreté du Québec
5 novembre 1998
Florent Gagné est directeur général de la Sûreté du Québec de 1998 à 2003.
Sociologue de formation, monsieur Gagné est sous-ministre de la Sécurité publique du Québec depuis 1994 lorsqu’il prend la direction de la Sûreté du Québec le 5 novembre 1998, à l’âge de 53 ans. Il demeure en poste durant cinq ans. Auparavant, il est sous-ministre des Affaires municipales (Québec) à partir de 1989, où il était sous-ministre adjoint depuis 1983. Il a commencé sa carrière comme fonctionnaire fédéral et est entré dans la fonction publique du Québec en 1973. Il demeure directeur général de la Sûreté du Québec jusqu’en juin 2003 et poursuit sa carrière au gouvernement du Québec, où il est nommé sous-ministre des Transports le 6 octobre 2003.
Patrimoine de la Sûreté du Québec, 2020
Yves Morency devient directeur général par intérim de la Sûreté du Québec
6 décembre 2017
Yves Morency est directeur général par intérim de la Sûreté du Québec de décembre 2017 à décembre 2018.
Policier de carrière, Yves Morency débute comme patrouilleur en 1977 au service de police de la ville de Longueuil. En 21 ans de service au sein de cette organisation, Yves Morency y exerce plusieurs fonctions et grades dont sergent aux opérations stratégiques, sergent aux enquêtes criminelles, lieutenant, inspecteur et inspecteur administratif (assistant directeur). En 1998, il quitte la ville de Longueuil pour accepter le poste de directeur du Service de la sécurité publique de Saint-Eustache, qu’il occupe jusqu’en 2011. Approché par le ministère de la Sécurité publique du Québec en 2011, Yves Morency accepte le poste de sous-ministre associé à la Direction générale des affaires policières où il mène de main de maître d’importants dossiers stratégiques, dont plusieurs associés au domaine des enquêtes criminelles.
En novembre 2014, il quitte son poste de sous-ministre pour se joindre à l’État-major de la Sûreté du Québec en tant que directeur général adjoint de la Grande fonction de l’administration. Il est par la suite nommé directeur général adjoint de la Grande fonction des enquêtes criminelles, fonction qu’il assure de 2015 à 2017. À ce titre, il a notamment été responsable des enquêtes sur le crime organisé et sur les crimes contre la personne. En 2017, il devient directeur général adjoint exécutif avec comme principale responsabilité la négociation du contrat de travail des policiers. Mandaté pour remplacer le directeur général, Martin Prud’homme, prêté au Service de police de la Ville de Montréal, Yves Morency devient donc directeur général par intérim de décembre 2017 à décembre 2018. Au retour de Martin Prud’homme, Yves Morency est reconduit dans ses fonctions de directeur général adjoint exécutif, et ce jusqu’à sa retraite en avril 2021.
Détenteur d’un diplôme d’études supérieures en administration policière supérieure du Collège canadien de la police (1986) et d’un certificat en gestion des ressources humaines de l’Université du Québec à Montréal (1993), Yves Morency est également officier de l’Ordre du mérite des corps policiers depuis le 4 janvier 2018 ainsi que récipiendaire de la deuxième barrette (40 ans de service) de la Médaille de la police pour services distingués depuis le 17 juillet 2020.
François Beaudoin, conseiller en patrimoine, 2021
Jean-Baptiste Amyot devient commissaire de la Police provinciale
7 mai 1877
Le lieutenant-colonel Jean-Baptiste Amyot est commissaire de la Police provinciale de 1877 à 1878.
Monsieur Amyot, qui est aussi avocat, assume la fonction durant un an. Il est alors âgé de 34 ans. Au cours de sa carrière, il dirige de 1870 à 1871, à titre d’officier de milice, une compagnie de miliciens lors de l’expédition de la rivière Rouge au Manitoba. Il est assisté du surintendant Émile Bureau. Il décède à Québec en 1913. Il est alors adjoint au shérif du district judiciaire de Québec.
Patrimoine de la Sûreté du Québec, 2020
Affaire Cordélia Viau
21 novembre 1897
C’est en novembre 1897 qu’une frénésie médiatique s’empare du district de Terrebonne à la suite du meurtre d’Isidore Poirier à Saint-Canut. Les journaux s’accaparent de cette nouvelle et en publient tous les détails. L’ampleur de l’affaire Cordélia Viau est surtout visible lors du procès de cette dernière. En effet, on mentionne que 1500 personnes se sont présentées à son procès, dont un train complet en provenance de Montréal.
Mariés à Saint-Canut, le 4 novembre 1889, Isidore Poirier et Cordélia Viau ne font pas bon ménage. S’étant exilé aux États-Unis pour se trouver du travail, Poirier revient au Québec car, dit-on, son épouse entretient une relation avec Samuel Parslow. Malgré le retour de son mari, Cordélia Viau et son amant continuent de se fréquenter.
Poirier, menuisier de son état, travaille à la construction de la nouvelle église de Saint-Jérôme et revient chez lui tous les samedis pour y passer le dimanche. Le dimanche 21 novembre 1897, Viau passe la nuit chez son père pour veiller sa mère malade. À son retour le lundi matin, elle se bute à une porte verrouillée et à une maison qui semble vide. Pensant que son mari a quitté la maison pour Saint-Jérôme, elle se rend à l’église pour jouer de l’orgue à un mariage. Après la noce, elle demande l’aide de monsieur Bouvrette, son voisin, pour pénétrer dans sa maison. Une fois à l’intérieur, prétextant avoir peur, elle demande à monsieur Bouvrette d’aller jeter un coup d’œil dans la chambre dont la porte est close. C’est à ce moment que monsieur Bouvrette découvre le cadavre égorgé d’Isidore Poirier sur le lit.
Viau et Parslow insistent beaucoup sur la thèse du suicide. Cependant, des marques de lutte dans la chambre et des traces de sang dans d’autres pièces de la maison laissent supposer qu’il s’agit bel et bien d’un meurtre.
Ce sont le coroner Mignault et le détective Peter McCaskill qui s’occupent de l’enquête. Le 25 novembre 1897, McCaskill appréhende Cordélia Viau et Samuel Parslow pour le meurtre d’Isidore Poirier. Le détective tente d’obtenir des aveux durant le trajet pour la prison du district de Terrebonne à Sainte-Scholastique. Ce n’est qu’une fois rendu que Viau fait des aveux en accusant Parslow d’avoir commis le crime. Lorsque Parslow est informé de la déclaration de sa complice, il avoue son crime, mais en impliquant aussi cette dernière.
Le premier procès de Cordélia Viau s’ouvre le 17 janvier 1898. Les preuves circonstancielles s’accumulent lors de celui-ci. On y apprend, notamment, qu’antérieurement au meurtre d’Isidore Poirier, Viau prend une assurance sur la vie de son mari d’une somme de 2 000 dollars dont elle est la bénéficiaire. Elle a même pris la peine d’écrire à l’assureur pour demander « si la Compagnie paierait l'assurance dans le cas où son mari serait tué, par accident ou par suite d'un crime, s'il était empoisonné, s'il mourait d’une mort violente quelconque » (affaire Cordélia Viau (meurtre de Saint-Canut), p. 24).
Le 2 février 1898, le jury déclare Cordélia Viau coupable de meurtre. Cependant, les procureurs de la défense décident de porter la cause en appel. Un second procès est intenté entre le 5 et le 15 décembre 1898 avec la même conclusion que le premier. Dans le cas du procès de Samuel Parslow, il se déroule du 19 au 26 décembre 1898 et se termine avec le même verdict et une sentence similaire à celui de sa complice.
C’est le 10 mars 1899 que Cordélia Viau et Samuel Parslow sont pendus dos à dos à la prison de Sainte-Scholastique sous la supervision du bourreau Radcliffe.
Patrimoine de la Sûreté du Québec, 2020
Dieudonné Daniel Lorrain devient chef de la Police provinciale, Division de Montréal
30 août 1922
Dieudonné Daniel Lorrain est chef de la Police provinciale, Division de Montréal, de 1922 à 1928.
Âgé de 51 ans lors de sa nomination, monsieur Lorrain quitte son poste près de six ans plus tard. De 1917 à 1922, il dirige le Bureau des détectives provinciaux à Montréal, en remplacement de Peter Kenneth McCaskill. Il partage sa fonction de chef de la Police provinciale avec son collègue Augustin McCarthy à Québec. Il meurt le 30 septembre 1952 à l’âge de 81 ans.
Patrimoine de la Sûreté du Québec, 2020
Jeux olympiques de Montréal
17 juillet 1976
C’est à Montréal, en 1976, que se déroule la XXIe Olympiade de l’ère moderne, la première ayant lieu au Canada. La Sûreté du Québec, mais aussi le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal, la Gendarmerie royale du Canada et les Forces armées canadiennes ont un rôle important à jouer pour la sécurité des Jeux.
Munich
L’étude de la sécurité des Jeux de Munich en 1972 permet aux forces policières d’apprécier l’ampleur de la tâche qui les attend. Malgré la vaste organisation sécuritaire mise en place à ces jeux, des attentats ont lieu, et onze athlètes et accompagnateurs israéliens ainsi qu’un policier allemand sont tués. Puisqu’on ne veut pas que ces événements se répètent, la sécurité aux Jeux de Montréal devient primordiale.
Opération Olympique 1976
C’est en 1973 que débute officiellement la planification de la sécurité des Jeux de Montréal sous l’appellation « Opération Olympique 1976 ». Pour l’occasion, la mission des forces policières n’a pas été modifiée, mais les circonstances amplifient la tâche. Il faut sécuriser les points névralgiques et prévoir tous types d’agressions possibles.
Pour ce faire, la Sûreté du Québec aborde le problème à partir de la structure normale de l’organisation, qui se modifie d’elle-même lors d’événements d’urgence. Chacune des directions de la Sûreté du Québec joue le rôle qui lui est assigné en temps normal et lors d’événements d’urgence.
Pour compléter cette structure, des éléments de soutien et des éléments opérationnels répondant à des besoins spécifiques sont ajoutés tels que le Centre de logistique et le Centre de coordination. Ce dernier est le point central où convergent tous les rapports sur la situation de tous les sites et sur le déroulement général des Jeux.
Innovations et coopérations
Cette opération est l’occasion de mettre en place quelques nouveautés et de renforcer la coopération policière au Québec. En effet, la Sûreté du Québec, en collaboration avec la Gendarmerie royale du Canada, les Forces armées canadiennes et l’Office des autoroutes, doit sécuriser la zone d’insécurité précédant l’atterrissage ou suivant l’envol d’un avion transportant des athlètes ou des personnes importantes. Le but étant d’éviter les attentats au missile contre les avions allant et venant de l’aéroport de Mirabel, l’efficacité entre les collaborateurs et les intervenants est primordiale.
Le contrôle des armes à feu est aussi un enjeu de taille lors de cette Olympiade. En effet, 428 athlètes participent aux différentes compétitions de tir à la cible. L’innovation est nécessaire, car il n’y a aucun précédent de contrôle des armes à feu dans une telle situation au Canada. Un système à la fois efficace et pratique est mis en place en accord avec les fédérations nationales et le Comité principal de sécurité publique des Jeux olympiques.
À l’entrée au Canada, les armes à feu appartenant aux athlètes sont prises et conservées sous la garde de la Sûreté du Québec jusqu’à leur sortie du pays. Les athlètes ont accès en tout temps à leurs armes, mais ne peuvent les utiliser que dans des zones définies et contrôlées.
C’est également à l’occasion des Jeux olympiques que la Sûreté du Québec utilise pour la première fois des postes de commande mobiles. Plusieurs de ces postes sont déployés sur les différents sites de compétition afin d’aider à la gestion de la sécurité sur plusieurs centaines de kilomètres carrés.
Pour contrer les menaces les plus sérieuses lors des Jeux olympiques, la Sûreté du Québec met en place son propre Groupe tactique d’intervention temporaire formé d’une équipe multidisciplinaire mise sous un même commandement. Durant les Olympiques, cette unité temporaire est présente 24 heures par jour durant 50 jours. En plus de se tenir prête à toute intervention, elle seconde les services de sécurité à Bromont durant les sports équestres. Ceux-ci requièrent une sécurité spéciale, car ils mettent en vedette une athlète royale : la princesse Anne de la famille royale britannique.
Parcours de la flamme olympique
Quelques jours avant l’ouverture de la XXIe Olympiade, la flamme olympique est allumée et relayée d’Olympie à Ottawa et, par la suite, à Montréal. Pour souligner la contribution importante de la Sûreté du Québec dans l’organisation de la sécurité des Jeux de Montréal, le directeur général Jacques Beaudoin et l’équipe de la Sûreté du Québec ont l’honneur de porter le flambeau au kilomètre 150 du parcours de la flamme olympique en terre canadienne. Pour ce moment historique, le porteur officiel de l’équipe de la Sûreté du Québec est le caporal Robert Auger.
Finalement, la sécurité des Jeux de Montréal a impliqué 16 000 policiers et soldats sur 27 sites de compétition. Sur les 16 000 personnes impliquées dans la sécurité des Jeux, 1 400 policiers de la Sûreté du Québec sont présents dans la région métropolitaine seulement. Avec un tel déploiement pour la sécurité et une planification minutieuse de la part des intervenants, les Jeux olympiques de Montréal sont encore considérés aujourd’hui comme étant parmi les jeux les plus sécuritaires de l’ère olympique moderne.
Patrimoine de la Sûreté du Québec, 2020
Création de l’unité de protection rapprochée
11 octobre 1970
Avec la construction du nouveau palais législatif à Québec en 1883, et suite à l’attentat à la bombe visant celui-ci en 1884, le gouvernement du Québec mandate la Police provinciale, nouvellement reconstituée, pour garder les édifices gouvernementaux. Les constables sont également appelés à faire la garde lors des réceptions faites à Spencer Wood, résidence des lieutenants-gouverneurs du Québec de 1870 à 1966. La prise en charge de ces nouvelles tâches est le premier pas de l’organisation vers la protection physique immédiate des personnalités publiques et des dignitaires. Pendant de nombreuses décennies, la Police provinciale se limitera à cette infime partie du travail dévolu à la première unité de protection rapprochée permanente de la Sûreté du Québec : la sécurité des lieux de travail et de certains édifices gouvernementaux, ainsi que la protection ponctuelle de certains dignitaires lors de réceptions.
Jusqu’au début des années 1970, la sécurité physique immédiate des personnalités publiques et des dignitaires n’est pas systématique et organisée. La Sûreté provinciale accorde ce genre de protection à des personnalités politiques seulement si des menaces le justifient ou si le climat social l’exige. Sinon, le premier ministre et ses ministres jouissent de la présence de chauffeurs payés par le gouvernement, mais d’aucun garde du corps gouvernemental officiel. Pour sa part, le premier ministre Maurice Duplessis s’octroie le privilège d’une protection physique immédiate privée en la personne de monsieur Walter Duchesnay qui le suit partout, sauf en période électorale. En effet, lors d’une campagne électorale, un sergent de la Sûreté provinciale est libéré et obtient la responsabilité de la protection rapprochée du premier ministre.
De leurs côtés, les dignitaires étrangers ont, dans la majorité des cas, droit à une certaine forme de sécurité physique lors de leurs passages au Québec. La plupart du temps, cette sécurité se matérialise sous forme d’escorte en motocyclette comme lors de la visite de Leurs Majestés le roi George VI et la reine Élisabeth en 1939 ou de haie de protection comme lors de la visite de Leurs Altesses Royales la princesse Élisabeth et le duc d'Édimbourg en 1951.
Ce n’est cependant qu’à partir de 1970 que la Sûreté du Québec implante une équipe permanente de protection rapprochée. Les circonstances tragiques entourant l’enlèvement du ministre du Travail, Pierre Laporte, en octobre 1970, poussent l’organisation à prioriser cet aspect de la sécurité des parlementaires (premier ministre, ministres et leurs familles), dignitaires et magistrats. Un nouveau service est créé et plus d’une centaine de policiers y sont mutés, ceux-ci provenant de diverses escouades et unités. Dans l’urgence, aucun critère de sélection n’est établi et aucune formation spécifique n’est donnée. Le mandat du nouveau service ne se limite pas seulement à la sécurité physique immédiate, mais également à la sécurité des résidences, des lieux de travail et de certains édifices parlementaires.
Cet énorme mandat est réduit en 1972 lorsque le Service de sécurité interne du ministère de la Justice est créé par arrêté en conseil. Ce nouveau service du ministère de la Justice obtient le mandat de fournir le transport et la protection de tous les ministres n’étant pas sous la juridiction de la Sûreté du Québec. Seuls les premier ministre, vice-premier ministre et ministre de la Justice conservent les services du corps de police provinciale.
En 1976, l’arrivée du Parti québécois au pouvoir impose de grands changements aux effectifs de l’unité de protection rapprochée. Le nouveau Premier ministre n’accordant pas une importance aussi grande à sa sécurité que son prédécesseur, la Sûreté du Québec s’adapte en réduisant les effectifs de l’unité et en utilisant des moyens électroniques pour surveiller la résidence du premier ministre et ses bureaux. C’est également à ce moment que la responsabilité de la surveillance des édifices gouvernementaux passe sous la responsabilité du Service de sécurité interne du ministère de la Justice avant de revenir dans le giron de la Sûreté du Québec après l’attentat perpétré par le caporal Lortie en 1984.
Pour appuyer la souveraineté du Québec, le gouvernement souverainiste de 1976 demande à la Sûreté du Québec une plus grande implication dans la protection des dignitaires étrangers visitant la Province, tâche qui incombait presque exclusivement à la Gendarmerie royale du Canada à cette époque. L’unité de protection est donc impliquée dans plus de 112 visites officielles de représentants étrangers, dont celle de Leurs Majestés le roi Beaudoin 1er et la reine Fabiola de Belgique en 1977. À cela s’ajoute plus de 50 événements spéciaux et d'envergure nécessitant un déploiement de sécurité à la fin des années 1970.
La fin des années 1970 marque également le début d’une formation professionnelle spécifique pour les gardes du corps. En effet, avant 1978, les techniques et les façons de faire sont transmises de bouche à oreille. Pour améliorer et uniformiser les techniques de travail, une formation obligatoire est donc mise en place. Celle-ci est peaufinée et améliorée tout au long des décennies 1980 et 1990, au gré des transformations de l’unité de protection rapprochée.
En 1982, l’unité de protection rapprochée accueille madame Sylvie Guimond, première femme garde du corps de la Sûreté du Québec. Elle est surtout affectée à la protection des dignitaires en visite au Québec. Madame Guimond quitte l’unité en 1989 lorsqu’elle est promue caporale au poste de Candiac. Son passage au sein de l’unité a contribué à l’abolition des préjugés voulant que la grandeur et la force physique soient un important prérequis pour effectuer ce travail.
La visite au Québec de Sa Sainteté Jean-Paul II en 1984 est un événement d’importance dans l’histoire de la province. La majeure partie des effectifs de la Sûreté du Québec est mobilisée lors de cette visite et l’unité de protection rapprochée fait bien évidemment partie de ceux-ci. Puisque le Pape effectue alors une visite pancanadienne, la protection immédiate de celui-ci est assurée par la Gendarmerie royale du Canada. La Sûreté du Québec s’est plus particulièrement occupée de la sécurité des sites et des visiteurs, de la protection du train papal et des voies ferrées contre les attentats potentiels ainsi que du cortège papal et de sa cavalcade.
Les années 1980 et 1990 sont également synonymes de compressions budgétaires et d’une vision gouvernementale plus minimaliste de la protection du premier ministre aboutissant à une réduction des effectifs de l’unité. Plus spécifiquement, les années 1990 voient la diminution graduelle du mandat de protection des dignitaires étrangers en visite au Québec au profit de la Gendarmerie royale du Canada.
À cette même époque, en 1996, une première femme se voit confier la direction de l’unité de protection rapprochée. Madame Jocelyne Caron occupe le poste de responsable jusqu’en 1998.
Au début des années 2010, un changement de l’offre de service accordée par l’unité de protection rapprochée est mis en place. Après les élections provinciales de 2012, la Sûreté du Québec décide de concentrer sa protection sur le premier ministre et laisse la protection des chefs de l’opposition au Service de protection des personnalités du ministère de la Sécurité publique. La seule exception est lors des campagnes électorales. Durant cette période, la Sûreté du Québec offre sa protection à tous les chefs des principaux partis politiques.
La protection des dignitaires étrangers se fait en partenariat avec la Gendarmerie royale du Canada qui a pour mandat la protection des chefs d’état étranger. Après une évaluation du risque et du niveau de sécurité requis, un partage des responsabilités est effectué entre les deux organisations.
Lors de visites interprovinciales, l’unité de protection rapprochée assure la surveillance du premier ministre du Québec, mais également celle des premiers ministres provinciaux en visite dans la Belle province. Le Conseil de la fédération est un bel exemple de cette protection offerte par la Sûreté du Québec aux différents premiers ministres provinciaux. Ce conseil se réunit une fois par an dans chacune des provinces. Donc, le Québec accueille ce conseil une fois tous les dix ans.
Depuis sa création officielle en 1970, cette unité spécialisée de la Sûreté du Québec a su démontrer son professionnalisme et son expertise auprès des dignitaires pour lesquelles elle s’est impliquée.
François Beaudoin, conseiller en patrimoine, 2021
Luc Fillion devient directeur général par intérim de la Sûreté du Québec
14 août 2014
Luc Fillion est directeur général par intérim de la Sûreté du Québec d’août 2014 à octobre 2014.
Devenu directeur adjoint après 19 années de service au sein de la Sûreté municipale de Chibougamau, Luc Fillion se joint à l’organisation en 1998 lors de l’intégration du corps de police municipale à la Sûreté du Québec. Il entame son parcours en tant qu’adjoint au responsable du poste Chapais-Chibougamau. Il est ensuite promu sergent et accepte une assignation comme directeur du poste à la MRC d’Avignon-Bonaventure. Il obtient le grade de lieutenant en 2002, puis celui de capitaine en 2003 au moment où il devient responsable de la section Bas-Saint-Laurent dans le district Bas-Saint-Laurent–Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine.
Il est par la suite nommé responsable du Service de la sécurité des réseaux de transport et promu inspecteur en 2005. Un an plus tard, il est promu inspecteur-chef et devient directeur de la Direction du soutien à la gendarmerie. Il exerce alors un rôle-conseil auprès de la Grande fonction de la surveillance du territoire. Il devient ensuite commandant du district du Saguenay-Lac-Saint-Jean en 2009, poste qu’il occupera jusqu’en 2012, alors qu’il est nommé directeur général adjoint de la Grande fonction de la surveillance du territoire. En août 2014, il est désigné directeur général par intérim de la Sûreté du Québec jusqu’au mois d’octobre de la même année.
Diplômé en gestion des ressources humaines de l’Université du Québec en Abitibi-Témiscaminque, monsieur Fillion détient également un diplôme de deuxième cycle en développement organisationnel de l’Université Laval à Québec.
François Beaudoin, conseiller en patrimoine, 2021
Le Patrimoine de la Sûreté du Québec en ligne, c'est ...

303
objets

913
photographies

56
archives